2000 pages de suspense

2000 pages de suspense


Les livres des vacances. C’est la période de l’année où on peut s’enfiler des gros choux à la crème, des 1000 pages sirotées comme du petit lait. De la bonne littérature populaire (un mot qui ne sent pas mauvais). J’aime ces pavés, j’admire l’endurance de l’auteur, « c’est comme dessiner une grande fresque avec un seul poil de pinceau« , disait Donna Tartt (auteur de Le Chardonneret, entre autres et spécialiste des volumes superlatifs), en parlant du métier d’écrivain.

Pendant ces vacances j’ai donc lu deux livres, l’un issu d’une recommandation d’une lectrice sur la page Facebook anémique de Mots à Crédit, l’autre enfant d’un pur hasard. 2000 pages de marathon à suspens. 2000 pages sans reprendre son souffle.
Le premier, c’est 22/11/63 de Stephen King. Tout ce qu’il faut savoir de ce livre, je l’ai déjà écrit en parlant de Misery. King nous tient à la gorge pendant 1000 pages avec une histoire où il ne se passe quasiment rien. Un homme est chargé, au tout début (aux environs de la page 40), d’empêcher l’assassinat de Kennedy en voyageant dans le temps. Il se jette sur Lee Harvey Oswald aux alentours de la page 920. Entre-temps ? Il complote, il danse, il tombe amoureux, il enseigne l’anglais (son métier). 


Le second livre gisait dans une petite pile délaissée par les touristes précédents de la maison que nous occupions. Il y avait un Tom Clancy et Je suis Pilgrim, de Terry Hayes. Tout m’incitait à le laisser là où il était au profit d’un Verlaine, mais je ne me sentais pas capable de rester fidèle au poète pendant la seconde moitié des vacances. J’ai lu quelques poèmes et je me suis jeté sur Je suis Pilgrim. C’est un blockbuster, à classer dans le haut de gamme. C’est Hollywood sur page. Du palpitant, du rebondissement : le rythme, la tension, les héros surpuissants mais traversés de doutes, incapables d’aimer mais malgré assez intelligents pour déjouer les machinations les plus subtiles. 

La construction de ce récit est particulièrement originale et signée par un primo-romancier dont le métier est… scénariste. Il maîtrise le tempo et ne s’embarrasse d’aucunes longueurs. Il est vrai que le sort du monde est en jeu, pas moins, puisqu’un terroriste musulman prévoit de faire entrer le virus de la variole aux Etats-Unis, dans une mutation particulièrement contagieuse et mortelle. 

Des notes laissées par les propriétaires précédents du livre.

« Il y a des endroits dont je me souviendrai toute ma vie…« , c’est un début de film, avec la voix-off sur des images au ralenti. Toute cette rocambolesque aventure commence dans une chambre d’hôtel, par une affaire annexe à la principale (un meurtre avec usurpation d’identité et captation d’héritage), et les deux vont se retrouver mêlées à Bodrum en Turquie. Coup de bol. Un bon scénariste sait faire accepter la cohérence de ce qui est, au fond, un coup de poker narratif.

Et ça fonctionne. Les deux histoires permettent au héros – dont je ne me souviens plus du vrai prénom tellement il en a – de prouver sa brillance déductive, de virevolter sur les toits, de tuer un policier turc (le méchant bien sûr) avec une arme aussi originale que compliquée à manipuler : un voilier, de mettre son flair à l’épreuve et de profiter des avions de la CIA pour passer d’un pays à l’autre et, pas à pas, s’approcher du machiavélique musulman, un saoudien radicalisé, combattant en Afghanistan, qui n’est pas sans rappeler un certain Osama B. (même si l’ex-ennemi public numéro rencontre le méchant à un moment, pirouette permettant de désamorcer l’inévitable soupçon du lecteur).

Ces deux livres n’auront certainement pas de prix, en plus de celui indiqué sur leur quatrième de couverture, ce qui leur donne une certaine valeur. 

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