Le guetteur ronronnant

Le chat a surgi un jour de la sauvagerie et a élu domicile près de notre porte d’entrée, à côté des buches de bois. Sa gamelle s’est rapprochée, jour après jour, afin de l’apprivoiser – et afin qu’il nous apprivoise. Il habite chez nous, pas avec nous. Il se roule en boule, ouroboros  ronronnant, dans le linge propre et le linge sale, connait les points chauds et les tours de guet (le sommet de l’escalier lui permet de surveiller toute la pièce principale).

Un chat est un guetteur. Cette position, à la fois active d’observation et passive d’attente, est toute entière humaine. Le Désert des Tartares, Le Rivage des Syrtes, Un Balcon en Forêt : des romans de guetteurs… et chaque jour le chat (pas mon chat), allongé dans un rai de soleil traversant le parquet, ajoute un chapitre. Je sais, comme lui, qu’il ne se passera rien. Cela nous garde les yeux ouverts et le coeur sensible à la sauvagerie.