Ecriture et asservissement


Claude Levi-Strauss est un auteur plus radical qu’on veut bien le dire. Embaumé par la pensée officielle, l’anthropologue a pourtant signé des lignes controversées (et j’utilise cet adjectif miné dans son sens premier, que je veux positif : qui incite à la controverse, qui suscite les débats) notamment sur l’Islam (à la fin de Tristes Tropiques). Cette prise de position à contre-pied sur l’écriture, dans le même ouvrage, me plaît : « Il faut admettre que la fonction primaire de la communication écrite est de faciliter l’asservissement. L’emploi de l’écriture à des fins désintéressées, en vue de tirer des satisfactions intellectuelles et esthétiques, est un résultat secondaire. (…) La lutte contre l’analphabétisme se confond ainsi avec le renforcement du contrôle des citoyens par le Pouvoir : car il faut que tous sachent lire pour que ce dernier puisse dire : nul n’est censé ignorer la loi ».